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apiers d'identité, identité de papiers : jeu de mots ? Nullement.
C'est la dure réalité des faits qui impose cette inversion sémantique.
L'immigré / exilé, dit Gharih (en arabe),
l'absent (nom prédestiné ?), n'a de cesse d'être précisément confronté. depuis
son premier déracinement, à une série d'absences qu'il s'emploie bon an mal an
à combler, à commencer par l'absence renouvelée de droits concomitante de celle
de, papiers dont la (non) possession scande son temps de séjour soumis irrégulièrement
à 1'(in)validité. La carte de séjour, toujours ajournée. prend la figure d'une véritable
épée de Damoclès qui lui rappelle. s'il en est besoin, toutes sortes d'échéances à honorer
par un chapelet de sceaux qui devraient, aux yeux de l'administration papyphage, suffire
à résumer son être.
Mais comment résumer en formulaire une mémoire de travail, d'accidents et de silences ?
Comment dire un corps torturé pour convaincre les meurtrières des guichets qui s'en font
une bonne pâture à règlements ?
Cet appel à une guerre permanente d'inscription, est au principe des manques et vicissitudes
qui émaillent la vie de l'étranger astreint à dégorger son identité jusqu'à l'âme. ici pour
sauver sa peau, là pour échapper à la résiliation de sa résidence. Pour autant, son identité
en pièces, une fois - et parce que - réduite à quelques signes valideurs n'aura de sens
légal qu'en obéissant à l'impératif de la durée restreinte du séjour. Quant aux incertitudes
administratives et juridiques. elles ne font qu'engendrer et nourrir le provisoire et le
transitoire avec leur cortège de précarité et de marginalisation, autrement dit tout ce qui
constitue la matière pour le renvoi du National sans partage.
Pire. Les difficultés administratives et politiques sont en cette ère du règne binaire
de plus en plus déléguées à l'inflexible ordinateur qui a remplacé l'artillerie lourde
des frontières d'antan. Dès lors, la codification numérique des identités jugées en
marge n'arrange rien en ce qu'elle participe davantage de leur exclusion. L'espace
Schengen en donne quelques prémices inquiétantes.
Cependant, des communautés d'expériences et de situations naissent pour rassembler
tous les dénommés sans ( sans-papiers, sans-abri, sans droits, sans ressources, sans patrie...).
Elles opposent à la logique de la fermeture nationale d'autres valeurs identitaires pourvoyeuses
de citoyenneté pour avoir été chèrement conquises. celles qui se sont tissées dans les tranchées,
dans le grisou, plus encore celles qui projettent une communauté de destin forgée avec les débris,
du travail. les restes des repus, la quête commune de liberté passée ici comme ailleurs sous les
fourches Caudines de l'intolérance.
Plus qu'u.n procès de l'encartement discriminatoire, ce numéro (!) se veut palimpseste de toutes les identités écartées
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