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es enfants nouvellement arrivés (ENA), les élèves étrangers, les enfants
et adolescents migrants, les enfants «issus de parents immigrés», les
enfants des squats, etc. Toutes ces appellations, institutionnellement
contrôlées ou non, déclinent un même enjeu, crucial pour l’école comme pour son public :
l’hétérogénéité – sociale, culturelle, linguistique, statutaire, de parcours et de capital scolaire
– du public scolarisé dans le cadre de la loi sur l’obligation scolaire.
Pour ce public comme pour l’école, le défi est de réussir ou de rater leur rendez-vous.
On le comprendra à travers les contributions au présent numéro, réussir ce rendez-vous relève certes, en premier lieu,
des politiques et procédures d’accueil et de scolarisation spécifiques de ces publics et de formation des enseignants,
mises en place par l’Education nationale. Ce qui traduit en soi une reconnaissance de la diversité du public scolaire.
Cependant, la complexité des situations, l’importance des enjeux, l’évolution rapide des contextes,
la mondialisation des mobilités – fut-elle « par le bas » – , les pesanteurs administratives,
les incohérences ou les ambiguïtés des lois et des politiques parfois, etc., nécessitent encore le concours
d’autres types d’apports. L’énergie voire le dévouement d’acteurs scolaires et extrascolaires sur qui repose
l’efficience des dispositifs, la vigilance des réseaux et mouvements contre les expulsions d’enfants scolarisés,
la pugnacité des associations pour surmonter les embûches au droit à l’école, les éclairages des chercheurs et
formateurs aidant à bousculer préjugés et idées reçues, la construction de stratégies complexes pour contourner
les malentendus entre différents acteurs..., sont autant de signes qu’une veille reste de mise autour de ce public
quant à son intégration scolaire. Le risque serait en effet de reproduire, de manière anachronique, une stigmatisation
de ce public comme anomalie dans le paysage scolaire et de rabattre sur lui tous les problèmes
(ce qui serait une version scolaire opposant cet « étrange » public à une supposée « identité scolaire nationale »...).
Il y a trente ans en arrière, le regard social porté sur l’enfant d’immigré pouvait bénéficier
d’une certaine « méconnaissance » : il faisait endosser, souvent de manière naïve, à la « différence culturelle »
des familles immigrées tous les problèmes scolaires et sociaux des enfants
– et il en récoltait ambiguïtés et ambivalences. Les choses sont désormais plus complexes :
la « diversité » caractérise explicitement aujourd’hui la société, l’égalité (même des « chances »)
reste son pivot, les discriminations « directes et indirectes » sont combattues, etc.
« Choisir ou subir » l’immigration est un discours qui ne changera rien à la réalité d’une société confirmée
aujourd’hui comme société d’immigration (40.000 élèves primo-arrivants accueillis en 2004-2005) et devenue diverse,
multiple, socialement et culturellement. L’« intégration » ne peut plus se décliner désormais sous forme
d’une injonction ciblant un public « étrange » mais plutôt comme capacité que se donnent la société et
son école à prendre en compte la totalité de ses composantes. Telle est la responsabilité politique
et institutionnelle attendue. A cet égard, l'étude avant-gardiste sur les enseignants issus des immigrations
dont la synthèse est intégrée dans ce dossier, apporte des renseignements fort pertinents.
Ce numéro s’associe enfin aux Centres Ressources Enfance Famille Ecole (CREFE) de Rhône-Alpes,
pour fêter leur 20ème anniversaire. Ces centres ont contribué à former beaucoup d’acteurs de terrain
dans la région, à l’accompagnement péri-scolaire et à la construction de liens entre les familles
dans leur diversité et l’école. Les temps qui s’ouvrent pourraient bien rendre plus nécessaires
encore leurs ressources et leurs compétences.
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